Par : Adam S
Alors que la saison estivale approche à grands pas, à Jijel on s’affaire à préparer une édition qui risque d’être un remake des campagnes précédentes. Chaque année à la même période, les mêmes préparatifs sont à l’ordre du jour pour faire sortir un dispositif qui ne change pas. Les plages et les infrastructures sont les mêmes pour accueillir des estivants à la recherche d’une fraîcheur en bord de mer et rien de plus ! Loin d’être exigeants, ils se résignent à accepter ce qui est proposé. « Le tourisme sans service », pour reprendre une formule lancée par un acteur local du circuit touristique, est le maître-mot de ces éditions qui se suivent et se ressemblent. Depuis des décennies, on ne cesse, en effet, de prêcher les vertus de la filière touristique pour la relance de l’économie locale dans une wilaya où, paradoxalement, tout reste figé. Le statu quo dure et perdure. Il est le maître-mot d’une situation qui n’évolue pas. Sauf que dès que l’été arrive, c’est le remue-ménage qui se met en place. On se met brutalement à se rappeler qu’il y a une saison estivale à gérer. Mettre les bouchées doubles pour le jour « J » devient le défi à relever pour faire face à l’afflux des estivants sur des côtes qui n’ont que la beauté de leur rivage à faire valoir comme atout. Pour le reste, le chaos est à l’ordre du jour. Faute d’infrastructures hôtelières, la formule de l’hébergement chez l’habitant devient au fil du temps une solution pour pallier ce déficit. Depuis quelques années, sinon depuis la promulgation de la circulaire Interministérielle n°01 du 16 Juin 2012 relative au logement chez l’habitant comme « formule d’hébergement touristique », l’on ne cesse de faire sa promotion pour l’accueil des estivants. Les citoyens sont appelés à s’investir dans le circuit d’accueil des estivants en mettant à leur disposition leurs logements dans le cadre de cette formule. Le déficit en hôtels et en infrastructures de camping est tel que dans certaines communes, il n’y a même pas un modeste site pour prendre en charge l’hébergement des vacanciers. « Il n’y a même pas un dortoir », déplore, Boudib Abdennacer, guide touristique à Beni Belaid. Faisant l’effort de découvrir les plus beaux sites touristiques de cette région, il ne s’arrête pas d’énumérer ces « plages cachées » à découvrir à Rmila et Sahel, qui ne disposent, regrette-il, d’aucun accès. «Pour les atteindre, on organise des randonnées pédestres », souligne-t-il. Les randonneurs parcourent en aller-retour une douzaine de kilomètres, découvrant au passage, des sentiers montagneux surplombant une mer en contrebas de leur parcours. D’autres estivants prennent place, à partir de la plage Est, dans des embarcations pour atteindre ces rivages, qui font la réputation de Beni Belaid. Pour ce jeune militant de la cause touristique de cette région, il y a aussi la possibilité de découvrir un site écologique. C’est la zone humide. « Elle est classée site Ramsar et intéresse les scientifiques du monde entier», précise-il. L’effort de faire connaître les potentialités de cette région butte contre cet éternel déficit en matière d’infrastructures touristiques. L’investissement dans le secteur hôtelier est tributaire de la mise en œuvre des zones d’expansion touristiques (ZET), qui n’arrivent pas à décoller. Leur émergence n’est qu’un discours qui ne se traduit pas dans les faits. Au nombre de 19 au départ, elles sont passées à une dizaine pour cause d’agression de leur tissu foncier par les constructions illicites. Aux dernières nouvelles, on annonce toutefois l’imminente émergence de trois sites à Ouled Adouane, au Casino et à Tassoust, où « tout est fin prêt pour la concrétisation de ces projets ». Les autres ZET peuvent attendre. À défaut de leur concrétisation, elles continuent de faire l’illusion d’un tourisme qui se débat contre ses réflexes rudimentaires. Ce segment ne contribue d’ailleurs qu’à des proportions insignifiantes dans l’économie locale. Pis encore, il est l’apanage d’un circuit informel qui s’accapare le gros lot des dividendes générés à l’occasion de la saison estivale. Et même la formule de l’hébergement chez l’habitant échappe à tout contrôle et reste du seul ressort du circuit informel. Nonobstant tout ce ratage pour faire de Jijel une destination touristique de premier plan, dame nature a toutefois été au rendez-vous pour doter la célèbre corniche de ses meilleurs atouts. Pendant ce temps, c’est l’œuvre de l’homme qui fait défaut pour promouvoir un circuit touristique qui continue de se débattre contre son marasme. Bannir l’idée de ce « tourisme sans service » devient un défi à relever pour donner à Jijel la place qui peut être la sienne dans la carte touristique nationale.