Par : M.RAHMANI
L’informel. Cet éternel phénomène qui à chaque fois renaît de ses cendres car il y a absence de volonté réelle de l’éradiquer. Ce sont juste quelques interventions ponctuelles sans réel impact qui concernent certains quartiers bien définis avec des opérations dites coup de poing mais qui sont limitées dans l’espace et dans le temps. Ensuite c’est la débandade, le désordre et l’anarchie qui prennent le dessus On envahit les rues, les trottoirs, les chaussées, les places publiques, les cités et même les bords des routes et cela fait désormais partie de notre quotidien. Patiemment mais sûrement l’informel est en train de supplanter le commerce légal soumis, lui, à des règles strictes avec des contrôles quasi-quotidiens.
A Annaba comme ailleurs à travers le pays, des campagnes sont menées à chaque fois pour l’éradiquer mais comme cela reste des campagnes sans lendemain puisque dès qu’il y a relâchement des agents de la voie publique, c’est l’envahissement général. Les policiers affectés à la voie interviennent souvent pour « nettoyer » les artères de la ville, la rue Ibn Khaldoun ex Gambetta, la rue l’émir Abdelkader, El Hattab, la placette derrière le théâtre faisant la chasse à ces commerces illicites.
Les rues sont rendues au public, la ville respire mieux et la situation va s’améliorer mais juste après, c’est un retour en force qui est constaté au niveau de ces mêmes espaces et certains de ces commerçants vont jusqu’à narguer les forces de police qui détournent le regard.
Les commerçants établis voyant que la situation empire ont eux aussi occupé les trottoirs attenants à leurs boutiques pour y exposer leurs marchandises « Autant occuper nous-mêmes ces espaces car si on les laisse nous ne pourrons plus travailler. » nous dit un commerçant de la rue Ibn Khadoun.
Et cela empire à l’approche des fêtes religieuses ou du mois sacré de Ramadan, de nouveaux arrivants s’établissent et ne trouvant pas d’espaces pour étaler leurs articles, ils débordent sur la chaussée qui devient exiguë ne concédant qu’une petite bande pour le passage des véhicules qui, normalement est à double sens. Des armatures, des cartons retournés, des bâches, des charrettes et autres se dressent sur les trottoirs et les chaussées pour fourguer aux clients qui se bousculent des marchandises pas toujours bonnes. Ustensiles de cuisine, étoffes, robes d’intérieur, serviettes, parfums, sous-vêtements, lingerie féminine, chaussures et sandales, on y trouve de tout. Sur les produits manufacturés proposés à la vente, il n’y en a pas un seul qui soit « made in Algeria ».
Les produits chinois tiennent le haut du pavé, prix abordables pour les petites bourses, marchandages et propositions alléchantes de la part des vendeurs viennent à bout des réticences. Le vendeur encaisse et le client rentre chez lui croyant avoir fait une affaire. Mais ces produits ne tiennent pas une semaine car fabriqués à partir de matériaux fragiles avec des défauts et des vices cachés qui n’apparaissent qu’à l’utilisation.
Les produits nationaux ne sont pas vraiment prisés par ces commerçants de l’informel qui n’ont d’yeux que pour les produits importés dont ils louent la qualité. Publicité mensongère juste pour convaincre les clients et se remplir les poches. Des millions de DA sont ainsi brassés chaque jour dans la rue sans aucune forme de contrôle, pas d’impôts, pas de contrôle qualité, pas d’échantillon prélevé pour analyse, on laisse faire alors que les risques sur la santé publique sont flagrants.
Les mesures prises par les autorités pour endiguer ce phénomène se sont avérées inefficaces, au contraire, elles ont encouragé cette engeance à proliférer et à s’imposer sur le marché. En effet, pour un marché de proximité construit et qui soustrait à la rue une soixantaine ; voire une centaine de commerçants de l’informel, de nouveaux arrivants font surface pour occuper les espaces libérés par les premiers. Les campagnes qui restent au stade de campagne n’y font rien et dès que les autorités relâchent « la pression » on revient à la case départ sinon pire encore.
La solution serait l’application stricte de la loi, sans concession aucune avec le maintien des forces de l’ordre pour cette opération de salubrité publique et en finir ainsi une fois pour toutes avec ce phénomène qui porte atteinte à l’économie nationale. Mais apparemment cela n’est pas pour demain et l’on risque d’attendre encore longtemps avant que cela ne soit appliqué rigoureusement.