Par : Hamid Baali
Siège d’une sous-préfecture durant l’époque coloniale, Guelma a toujours été une ville prospère, réputée pour la qualité de son blé, de ses vergers généreux, de ses cultures maraîchères, de son élevage de bovins, ovins et caprins, de son imposant marché à bestiaux et de son commerce florissant. Sa gare ne désemplissait jamais car le Transmaghrébin Casablanca-Alger-Tunis transitait par Constantine, Guelma et Bouchegouf, et cette opportunité lui conférait la notoriété au sein des usagers des chemins de fers algériens. D’autre part, le transport des marchandises, des messageries et des colis était prédominant car cette formule était économique, avantageuse et pratique.
Durant l’hiver 1956, les graves intempéries qui avaient affecté la région avaient emporté un tronçon ferroviaire aux abords de Oued Zénati et les autorités françaises, confrontées à la Guerre de Libération Nationale, préférèrent changer l’itinéraire du Transmaghrébin qui desservit dès lors Constantine, Annaba et Bouchegouf. La réhabilitation du réseau endommagé fut reportée aux calendes grecques, et ce fut le début du déclin de la grande gare de Guelma. Le trafic ferroviaire s’opérait par le biais de la gare de Bouchegouf qui assurait les destinations Annaba, Tébessa, les mines d’Ouenza et la Tunisie, via Ghardimaou. D’aucuns conservent des souvenirs indélébiles relatifs aux vacances en Tunisie où il fallait prendre le petit train diesel à la gare de Guelma vers six heures du matin pour rejoindre Bouchegouf, à une quarantaine de kilomètres, via la gare de Nador, et attendre l’arrivée du Transmaghrébin pour rallier ce pays voisin.
Durant trois décennies, les familles guelmoises prenaient plaisir à emprunter ce mode de locomotion agréable, et la SNTF s’évertuait à offrir des prestations de service satisfaisantes. À la fin des années 1990, le Transmaghrébin cessa ses rotations pour des raisons obscures au grand dam des usagers des trois pays voisins. Ce fut la condamnation irréversible de la grande gare de Guelma , qui cessa définitivement le transport des marchandises et des voyageurs via Bouchegouf. Ce réseau ferroviaire d’une quarantaine de kilomètres est livré aux intempéries, il est envahi par les broussailles, les ronces, et les rails, faute d’entretien, offrent un spectacle affligeant. La petite gare de Nador est squattée par des familles, et le silence pesant des lieux est stressant. Celle de Guelma , une imposante bâtisse jadis agréable et bruyante, est fermée depuis des années car son exploitation a définitivement cessé. Les lieux sont sinistres et les nostalgiques du train sont consternés. Les terrains avoisinants ont servi d’assiettes pour la réalisation d’équipements publics. Ces dernières années, le ministère des Transports s’était attelé à réaliser des réseaux ferroviaires dans les régions Ouest, Centre et Est du territoire mais a délibérément délaissé celui de la région de Guelma.
L’espoir est enfin permis, car nous apprenons de source officielle qu’en application d’une instruction présidentielle relative à la relance des projets suspendus dans le cadre des mesures restrictives précédentes, Mme la wali de Guelma a présidé le 13 décembre une séance de travail consacrée à l’examen d’une éventuelle levée de gel du projet de la réalisation de ce tronçon ferroviaire de 140 kilomètres et qui a regroupé les responsables locaux, le directeur général de l’agence nationale des études et suivi des réalisations et de l’investissement ferroviaire, accompagné de ses cadres et du directeur régional de la société nationale de transport ferroviaire (SNTF). Un exposé sur data-show a permis à l’assistance de s’imprégner sur l’état actuel de cette ligne ferroviaire. Des propositions ont été formulées quant à sa réhabilitation selon les études émises dans un passé récent. Ce projet est prévu selon deux options, l’un de 139 km et l’autre de 120 km et il a suscité un riche débat. La cheffe de l’exécutif de wilaya a insisté sur l’importance de ce dossier qui vise le désenclavement de plusieurs régions de la wilaya et la redynamisation du transport de voyageurs et de marchandises sachant que la wilaya de Guelma occupe une position géographique stratégique en sa qualité de relais entre le Nord, les Hauts-Plateaux et le Sud du pays. Mme Houria Aggoune a plaidé l’utilité de ce projet et s’est efforcée de convaincre les pouvoirs publics de lever le gel tant attendu par la population.