Les discussions autour de la place des femmes dans le théâtre algérien se poursuivent dans le cadre du Festival national de la production théâtrale féminine. Hier, la salle d’honneur du Théâtre régional Azzedine Medjoubi d’Annaba a accueilli une conférence intitulée « Le rôle du théâtre institutionnel dans le développement du théâtre féminin en Algérie », animée par le dramaturge et journaliste Hmida Ayachi, le professeur Nacer Khelaf et la docteure Hassina Bouchikh. L’événement a réuni des chercheurs, des universitaires et des passionnés de théâtre, venus échanger sur les dynamiques qui façonnent la scène féminine en Algérie.
Dans son intervention, Hmida Ayachi a souligné l’importance d’une réflexion approfondie sur la place des femmes dans la production théâtrale. Il a insisté sur l’implication nécessaire des institutions publiques pour promouvoir le théâtre féminin, en mettant en avant le rôle que pourraient jouer des ministères tels que la Culture, l’Intérieur, l’Enseignement supérieur et les Moudjahidine.
Il a notamment mis en lumière des expériences où le théâtre a été introduit dans les établissements pénitentiaires pour jeunes filles. Selon lui, de telles initiatives peuvent offrir un cadre de réinsertion sociale et d’émancipation aux détenues. Il a également plaidé pour le développement du « Théâtre des jeunes filles » au sein des écoles et des universités, arguant que les facultés des arts pourraient jouer un rôle essentiel dans la promotion de cette discipline.
En parallèle, le lien entre le théâtre féminin et la mémoire nationale a été mis en avant. Hamida Ayachi a rappelé que les femmes ont joué un rôle majeur dans la guerre de libération et que le ministère des Moudjahidine, disposant d’un budget conséquent, pourrait financer des productions théâtrales axées sur cette mémoire. Selon lui, la création d’un Conseil national culturel et artistique pour les femmes permettrait d’accroître la visibilité du théâtre féminin dans divers espaces, qu’il s’agisse des écoles, des universités ou même du théâtre de rue.
De son côté, le professeur Nacer Khelaf, chercheur en arts dramatiques, a présenté une analyse historique du théâtre féminin algérien avant la création du festival en 2012. Il a dressé un état des lieux statistique couvrant la période de 1963 à 2012, soulignant un constat frappant : l’absence de dramaturges féminines.
Présente lors de la conférence, la réalisatrice Fouzia Aït El Hadj, figure pionnière du Festival, a tenu à rappeler le véritable objectif de cet événement : imposer le rôle des femmes dans la création théâtrale. Elle a évoqué les difficultés rencontrées par les femmes pour s’imposer dans ce domaine, soulignant qu’elle a elle-même commencé à une époque où il était difficile pour une femme de produire.
Toutefois, elle a insisté sur le fait que ce festival ne vise en aucun cas à instaurer une discrimination entre hommes et femmes, mais plutôt à offrir un espace d’expression et de valorisation du talent féminin. Pour elle, il ne s’agit pas d’opposer les genres, mais de permettre aux femmes de trouver leur place et de contribuer activement à l’évolution du théâtre algérien.
Ikram Saker