Le 8 Mai 1945, alors que la France célèbre la fin de la seconde guerre mondiale et la victoire des Alliés sur l’Allemagne Nazie et la France de Vichy. À Annaba, une foule composée du Parti du Peuple Algérien (PPA) a envahi les rues pour réclamer la libération des nationalistes emprisonnés. Des pancartes surgissent rappelant les engagements de la France et ses alliés : «Nous voulons être égaux», «À bas le fascisme et le colonialisme», «Vive l’Algérie libre et indépendante».
Mais, comme ailleurs, l’administration coloniale et les forces de l’ordre françaises perçoivent ces rassemblements comme une menace. Des heurts éclatèrent entre manifestants et forces de l’ordre. À la vue de l’emblème national, la police tira en faisant, selon certaines sources historiques, «une dizaine de morts». Bien que les violences à Annaban’aient pas atteint l’ampleur dramatique de celles de Sétif, Guelma et Kherrata, la ville n’a pas été épargnée.
Des perquisitions, arrestations et intimidations ont ciblé les milieux nationalistes. Selon un correspondant du «Journal de Bône» de l’édition du 9 Mai 1945, la situation de sérieux affrontements entre la population et les forces de l’ordre. «Dès onze heures, des accrochages ont éclaté à hauteur de la rue Caraman.
Des coups de feu auraient été tirés en l’air pour disperser la foule, tandis que plusieurs manifestants ont été appréhendés. Et d’après des témoins, des brutalités policières avaient été commises». Et des figures connues de la cause nationaliste à Bône parmi lesquelles Bachir Hadj Ali, ont été signalées absentes de leur domicile.
45 après, Ahmed B. témoigne
Le témoignage de Ahmed B a été recueilli en 1985, alors jeune ouvrier dans un atelier de mécanique. Il avait 22 ans au moment des événements. Il était un membre discret du Parti du Peuple Algérien. Il se souviendra, à force de détails, de cette journée mémorable.
«C’était un mardi. Pour fêter l’évènement, on a préparé des banderoles et on s’est donné rendez-vous près de la Colonne. Une foule fut composée de dockers, d’étudiants et de personnes âgées.
Au bout d’un moment, la police coloniale est intervenue, puis ce fut la répression.» Ahmed B se souvient amèrement des arrestations sommaires puis l’emprisonnement à la maison d’Arrêt de Bône pour certains et d’autres déportés à la prison d’El Harrach.
Des propos de Ahmed B se dégage de l’amertume et de la colère, mais aussi de l’humiliation de tout un peuple. Ainsi, cet événement tragique a marqué un tournant dans l’histoire de l’Algérie coloniale. La répression brutale des manifestations a renforcé la détermination des Algériens à lutter pour leur histoire, jetant les bases du mouvement nationaliste qui aboutira à la guerre d’indépendance le 1er novembre 1954.
Par : A.Ighil