Par : M. L
Depuis plus de deux ans maintenant, le cimetière de Lalla Khroufa (Sidi Ali El Hattab), situé au niveau de la cité Auzas, est source de scandale à Annaba. Plusieurs organisations associatives ainsi que des particuliers engagés dans la protection du patrimoine local, ont saisi les autorités pour préserver ce qu’il restait de ce lieu historique, en vain.
Aujourd’hui, le chef de l’exécutif de la wilaya, M. Berimi, a finalement sommé le maire de la commune d’Annaba de prendre les mesures nécessaires pour préserver le cimetière squatté par des habitants illicites et devenu en plus, un lieu de débauche.
Cette décision intervient au lendemain de la décision de l’organisation bénévole « Annaba Patrimoine » de saisir le ministère de la Culture afin de dénoncer les manquements des autorités locales pour ce qui est de la protection de ce lieu chargé d’histoire.
A l’heure qu’il est, 8 familles occupent de manière illicites le cimetière. Loin de se contenter d’ériger leurs logements de fortune sur les bordures du cimetière, ces familles n’ont pas hésité à profaner des tombes afin d’intégrer ces espaces à leurs habitations. Ces dépassements ont été enregistrés sur plusieurs années et n’ont cessé de prendre de l’ampleur face à l’absence de réaction des autorités locales.
Si le cimetière de Lalla Khroufa n’est que peu connu à Annaba, il représente à lui seul, un bout d’histoire algérienne. Aujourd’hui déserté par les visiteurs, il était autrefois l’un des premiers cimetière d’Annaba, avec le cimetière d’El Tolba qui a laissé place à l’hôpital Ibn Sina et le cimetière de Sidi Salem qui a été démoli au début des années 1960.
Il ressort également que le cimetière aurait été établi en 1607, au lendemain d’une sanglante bataille ayant opposé les Toscans d’Italie aux musulmans d’Annaba qui ont réussi à empêcher le débarquement des Italiens sur leur sol. Au lendemain de leur victoire, les défenseurs d’Annaba ont dû enterrer un nombre conséquent de morts, dont faisait partie le Bey de Constantine, Ben Ferhat. Venu par hasard en visite à Annaba, le Bey avait cependant, choisi de se battre aux côtés des soldats musulmans. Le cimetière s’est vu attribué le nom de Lalla Khroufa, en hommage à la dame qui prodiguait des soins aux soldats blessés pendant la bataille.
Lorsque des éléments historiques avérés de cette ampleur sont mis en avant et communiqués au grand public par des chasseurs d’histoires bénévoles, n’est-il pas tout à fait sensé et légitime de prendre les mesures nécessaires pour préserver les lieux de la profanation, mais également des vestiges du temps ?
A l’heure où Annaba multiplie les efforts et les dépenses pour prétendre à une meilleure représentation de la ville, ne serait-il pas intelligent de faire aimer cette ville en ouvrant les portes de son passé et en réservant les lieux historiques à l’abandon aux activités culturelles ?
Cette tâche, le groupe de bénévoles Annaba Patrimoine, accepte volontiers de s’en occuper dans la limite de leurs prérogatives, n’hésitant pas à se livrer à de véritables bras de fer avec les institutions locales qui tardent souvent à réagir.