Face à un chômage qui dépasse 29 %, de nombreux jeunes décident de se prendre en charge et créent leurs propres emplois dans le numérique, l’agriculture ou… le commerce informel.
Le marché de l’emploi en Algérie est confronté à une pression sans précédent. Chaque année, plus de 250 000 diplômés arrivent sur le marché, tandis que le taux de chômage des jeunes âgés de 16 à 24 ans dépasse 29 %, selon l’ONS. Parmi eux, 42,5 % n’ont aucun diplôme, 26,1 % ont suivi une formation professionnelle et 31,4 % sont titulaires d’un diplôme universitaire. Ces chiffres reflètent une réalité difficile : l’accès à un diplôme ne garantit pas l’emploi et la compétition pour les postes disponibles reste intense.
Certains jeunes, disponibles mais découragés, ne figurent pas dans les statistiques officielles. Comme le souligne le chercheur Rabah Tarmoul dans un entretien accordé au magazine KAS Éco, cette population intermédiaire représente un réservoir de talents potentiels qui reste actif de manière informelle, mais souvent invisible dans les données officielles.
Réinventer l’avenir : quand les jeunes créent leurs propres emplois
Face à ces difficultés, de plus en plus de jeunes choisissent de se prendre en charge en développant leurs propres activités et microentreprises. L’auto-emploi et l’entrepreneuriat deviennent des réponses concrètes au chômage et à la saturation du marché traditionnel.
Le numérique attire particulièrement les jeunes : développement d’applications mobiles, création de sites web, e-commerce et services de marketing digital permettent de toucher une clientèle locale ou internationale avec des coûts limités. Ces métiers offrent flexibilité, autonomie et la possibilité de transformer une passion en activité rémunératrice.
L’économie circulaire et le recyclage connaissent également un essor important. Transformer des matériaux usagés en produits vendables permet de créer des microentreprises à faible investissement initial tout en répondant à des besoins locaux. L’agriculture biologique attire ceux qui souhaitent allier passion et revenus durables, tandis que les services de livraison et les plateformes de coursiers offrent une alternative souple au salariat classique.
Le commerce informel reste une solution accessible : importation de cabas, confection de vêtements, traiteurs ou vente de produits locaux constituent des sources de revenus immédiates et permettent aux jeunes de développer des compétences entrepreneuriales concrètes. Ces initiatives traduisent une volonté claire de s’affranchir du modèle d’emploi traditionnel et de valoriser la créativité et l’esprit d’innovation.
Des dispositifs publics pour soutenir l’initiative
Pour encourager ces dynamiques, l’État a mis en place plusieurs mécanismes de soutien à l’entrepreneuriat. Les dispositifs comme l’ANEM, l’ANGEM, la CNAC ou la NESDA offrent un accompagnement financier et technique aux jeunes porteurs de projets. Le ministère de l’Économie de la Connaissance et des Start-up, ainsi que l’arrêté ministériel n°1275 de 2022, visent à stimuler la création de microentreprises dans le cadre universitaire, transformant les étudiants en acteurs économiques et renforçant la culture entrepreneuriale.
Ces mesures ont permis l’émergence de milliers de très petites entreprises et de startups, donnant une première expérience professionnelle concrète et une autonomie économique à une partie de la jeunesse. Elles démontrent que la combinaison d’initiative individuelle et de soutien institutionnel peut générer des opportunités durables et diversifiées.
Des perspectives prometteuses mais encore fragiles
Malgré ces réussites, les jeunes entrepreneurs doivent surmonter plusieurs obstacles : accès aux financements, cadre réglementaire complexe et concurrence parfois rude. L’auto-emploi reste un parcours exigeant, qui nécessite créativité, organisation et persévérance. Pourtant, ces initiatives représentent un levier majeur pour réduire le chômage des jeunes et stimuler l’économie locale, tout en transformant la frustration et le découragement en opportunités concrètes.
La génération actuelle démontre ainsi une capacité à réinventer son avenir. Entre innovation, microentreprises et créativité, ces jeunes montrent que la résilience et l’initiative individuelle peuvent devenir de véritables réponses au chômage. Pour que ces trajectoires se multiplient et se stabilisent, un accompagnement renforcé de la part des pouvoirs publics reste indispensable. Simplifier l’accès aux financements, offrir un soutien technique et juridique, et encourager les projets innovants sont autant de mesures nécessaires pour transformer ces initiatives en succès durables.
Par : Aly D









