Les étendues infinies de l’Algérie ne se contentent pas de charmer le regard, elles ont aussi vu naître un genre musical qui résonne dans l’âme : le Desert Blues. Puisant dans les rythmes du Sahara et les traditions touarègues, cette musique envoûtante a conquis des publics à travers le monde, mêlant chants nomades ancestraux et riffs de guitare modernes.
Sous les nuits étoilées du Hoggar, le silence n’est jamais total. Entre dunes et montagnes de basalte, une guitare s’élève, reprenant le chant ancien des caravanes et l’appel profond du désert. C’est là qu’est né le blues touareg, le tichoumaren, capable de transformer les complaintes nomades en une musique universelle, à la fois hypnotique et rebelle.
Bien avant les amplis et les scènes internationales, les Touaregs confiaient leurs rêves et leurs blessures à l’imzad, violon monocorde aux accents plaintifs, et au tende, tambour des fêtes et veillées. Ces instruments donnaient voix à l’assouf, sentiment mêlant solitude, mélancolie et désir de liberté. Avec la guitare électrique, l’assouf s’est métamorphosé : les cordes métalliques prolongent les vibrations anciennes, traduisant la beauté austère du Sahara et l’âpreté de la vie nomade.
Dans les années 1980, à Tamanrasset, une génération de jeunes Touaregs branche ses guitares bricolées sur des amplis rudimentaires. Ibrahim Ag Alhabib, Hassan Ag Touhami et Inteyeden Ag Ablil fondent Tinariwen, groupe fondateur qui va donner au désert une bande-son planétaire. Leur musique raconte l’exil, la soif de justice et l’amour du désert. Tinariwen devient le visage d’un peuple et reçoit un Grammy Award en 2012.
L’histoire ne s’arrête pas aux pionniers. Tamikrest, formé en 2006, marie les racines touarègues à des sonorités mondiales, du rock psychédélique à la folk contemporaine. Imarhan, enfants du Hoggar, secouent la scène musicale avec un groove moderne mêlé à la nostalgie des tentes nomades. Afous d’Afous touche de nouveaux publics en rendant le tichoumaren accessible. Cette nouvelle vague expérimente funk, reggae ou disco, tout en restant profondément attachée au désert.
Écouter le Desert Blues, c’est entendre la respiration du Sahara. Les riffs lancinants rappellent le vent, les lignes de basse la marche des dromadaires, et les voix portent la mémoire des anciens poètes. Des festivals de Bamako à Coachella, du Roskilde danois aux clubs parisiens, cette musique transporte une part de Sahara, offrant concerts et cérémonies sonores où se croisent mémoire touarègue et quête d’authenticité universelle.
Par : Aly D