La Chambre criminelle du Tribunal d’Annaba a clos, mercredi passé, un dossier familial tragique. Deux hommes (un frère et son fils) ont été reconnus coupables du meurtre brutal de leur proche, survenu le 10 mai dernier à El-Kalitoussa, dans la commune de Berrahal. Le père, «B.M.H.», a écopé de vingt (20) ans de réclusion criminelle, tandis que son fils, «B.M.R.», a été condamné à la réclusion à perpétuité pour sa participation directe à l’homicide.
Un différend domestique transformé en drame
Les faits remontent à une dispute autour d’un simple grillage séparant deux écuries familiales. Selon les éléments de l’enquête, le conflit a éclaté lorsque l’accusé principal, «B.M.H.», aurait déplacé la clôture métallique délimitant sa propriété et celle de son frère, la victime «B.A.». Cette modification, perçue comme une tentative d’empiétement foncier, a ravivé une rivalité latente entre les deux familles proches.
Dans la soirée du 10 mai, la tension a dégénéré. Les enquêteurs ont établi qu’une altercation violente s’est produite devant les habitations familiales. Alertés par un appel téléphonique signalant une rixe au quartier des 200 logements, les services de sécurité de Berrahal se sont rendus sur place. Quelques minutes plus tard, la victime s’est présentée, grièvement blessée à la tête, au commissariat local pour porter plainte contre son frère et son neveu. Il a été, aussitôt, transféré à la clinique polyvalente de la commune, où il a succombé à un traumatisme crânien majeur provoqué par un coup porté avec une lourde barre de bois.
L’enquête et la reconstitution
Les policiers ont interpellé rapidement les deux suspects. Le Parquet de Berrahal a ordonné leur mise en détention provisoire et leur inculpation pour homicide volontaire.
Les auditions menées au cours de l’instruction ont confirmé la thèse d’un passage à l’acte collectif. L’épouse de la victime, «B.S.», a relaté que son mari a tenté d’intervenir après avoir entendu des éclats de voix entre leur fils et son oncle. Ce dernier, accompagné de ses enfants, aurait alors frappé la victime à plusieurs reprises, dont un coup fatal à la tête.
Les fils de la victime ont corroboré cette version, précisant que l’altercation a éclaté lorsque leur oncle a entrepris de déplacer le grillage séparant les deux terrains, en dépit d’un accord tacite en vigueur depuis plus d’une décennie.
Une qualification criminelle confirmée
Au procès, le rapport médico-légal a joué un rôle déterminant. Il a établi que le décès résultait d’une hémorragie cérébrale due à un impact violent. L’arme du crime, une grande baguette en bois assimilée à une arme prohibée, a été saisie sur les lieux.
Face à ces éléments, la Cour a retenu la responsabilité des deux co-auteurs. Le fils, jugé comme l’auteur principal, a reçu la peine maximale, la réclusion à perpétuité. Le père, reconnu complice actif et instigateur du geste fatal, a été condamné à 20 ans de prison ferme. Les juges ont justifié cette différence de peine par la hiérarchie des rôles et les antécédents comportementaux mis en évidence à l’audience.
Lecture pénale et portée sociale
Cette affaire met à nu la fragilité des relations familiales dans un contexte rural où la justice coutumière et les réflexes de vengeance supplantent souvent les mécanismes de médiation. Elle interroge également la fréquence des litiges fonciers dans les zones périurbaines d’Annaba, où l’absence de titres cadastraux précis nourrit les conflits entre proches.
Sur le plan pénal, le jugement renforce la jurisprudence algérienne en matière de co-auteurité et de responsabilité partagée dans les crimes domestiques. Il illustre aussi la rigueur avec laquelle la justice traite les homicides commis dans un cadre familial, là où la passion, souvent invoquée, ne saurait constituer une excuse atténuante.
Aucune information officielle ne mentionne pour l’heure un éventuel pourvoi en cassation. La partie civile, composée de la veuve et des enfants de la victime, a été reconnue dans ses droits à indemnisation pour le préjudice matériel et moral subi.
Par : Mahdi AMA