Sorti récemment, « Algériennes surexposées. Marc Garanger dans la guerre d’Algérie », signé par Zalia Sékaï, met en lumière la mémoire occultée des femmes durant la guerre d’Algérie. Dans cet ouvrage, l’écrivaine et chercheuse explore les visages photographiés en 1960 par Marc Garanger, jeune appelé de 25 ans, antimilitariste convaincu. Affecté dans l’Est algérien, il reçoit l’ordre de photographier les femmes pour des cartes d’identité. En dix jours, il réalise plus de 2 000 clichés, contraignant les villageoises à se dévoiler. Mais au-delà de cette tâche imposée, il capture clandestinement de véritables portraits, qui témoignent de la violence d’un système colonial oppressif.
Ces images, devenues célèbres, disent la domination multiple : coloniale, sociale, et raciale. Zalia Sékaï a choisi de les revisiter en croisant histoire, littérature et essai. « Pour tenter de capter le hors-champ de ces femmes algériennes, l’invisible, j’ai longuement travaillé à partir de documents strictement historiques. Puis il m’est apparu nécessaire de m’imprégner de récits, journaux, autofictions, pour proposer une histoire informelle et personnelle de la guerre », confie-t-elle.
Dans son ouvrage, l’auteure convoque également les voix de Mouloud Feraoun, Jean Sénac, Taos Amrouche ou Jules Roy, témoins marqués par le conflit. Leurs écrits apportent un écho sensible à ces images, reliant mémoire individuelle et mémoire collective.
Le livre accompagne une exposition présentée depuis le 25 septembre et jusqu’au 15 octobre à Paris. L’exposition, rendue possible grâce au prêt des portraits par Martin Garanger, fils du photographe, révèle des visages contraints mais dignes, porteurs d’une mémoire douloureuse. Elle interroge à la fois l’aliénation coloniale, les violences de guerre et la condition des femmes prises entre plusieurs dominations. Le vernissage et la rencontre-dédicace avec Zalia Sékaï ont eu lieu le 25 septembre. Une invitation à redonner une voix et une histoire à celles que la guerre avait réduites au silence.
Par : Aly D