Par : Fatima Zahra Bouledroua
C’est une lapalissade de dire que la presse n’existerait pas sans lectorat et que celui-ci n’en serait récepteur que s’il en est la cible. Pourtant, lors des célébrations ‘’datées’’ (Journée dédiées aux médias et à la liberté de la presse), ce lecteur est majestueusement ignoré des discours y afférents.
En effet, il n’y en a que pour publicité, audience, ventes, diffusion, invendus… autant de mots et bien d’autres dans le jargon de la presse ; mais rien à l’endroit du dernier maillon de la chaine, à savoir le lecteur. Pourtant, plus qu’au consommateur d’informations, c’est au citoyen que les médias s’adressent en premier lieu.
Car, la citoyenneté est un statut que l’on acquiert par-delà la simple inscription au registre des naissances de l’état civil. Ce concept étant posé, le citoyen-cible, s’approprie de fait et pleinement, sa part d’acteur essentiel et intègre ce ‘’monde’’ dans une sorte d’interactivité avec ‘’le support médiatique’’ qui saurait l’impliquer dans le quotidien de ‘’sa’’ cité et partant, de l’environnement national dont il est partie intégrante.
A ce titre, et pour prendre un exemple d’actualité ; la journée nationale de la presse constitue pour le quotidien francophone « Le Provincial » l’occasion de redynamiser ses actions citoyennes menées depuis sa création, loin des classiques et folkloriques rencontres.
Son approche résumée dans la devise « Le Provincial, le journal citoyen » rappelle que c’est pour le lecteur final, que l’on confectionne une édition.
Car, c’est pour LE CITOYEN que le journal existe.
La journée nationale de la presse, comme chaque année, est une date qui nous rappelle à quel point la situation de la presse en général et celle du journaliste en particulier est compliquée, dans une société agressée par un flux considérable de news et de fake-news.
Est-on dans une quête de sens ou bien son contraire que de célébrer cet évènement par des concours sur des thématiques redondantes et loin du réel, tel que la sempiternelle recherche de la définition de la liberté de la presse, organisation de cérémonies, ‘’tekrimet’’ qui font plaisir à certains et que d’autres dénigrent, conférences académiques et scientifiques qui relèvent les dysfonctionnements du secteur…etc.
Pour les hommes et femmes du métier, quelques bonnes nouvelles tout de même : L’on a noté la création d’un syndicat des éditeurs de l’information qui aspire à devenir un partenaire crédible pour organiser le secteur, création de maisons de la presse dans quelques wilaya, on a même été heureux d’apprendre l’octroi d’un quota de logements sociaux pour les journalistes d’une wilaya où ils mènent des combats quotidiens pour faire entendre la voix de leurs concitoyens.
Oui, mais…
Au milieu de ce vacarme cérémonial, « Le citoyen » une partie prenante de taille, ne semble pas avoir eu une plus grande place dans les débats et les stratégies des entreprises de presse encore cette année. N’est-ce pas ce citoyen même qui contribue à générer la finance à même de faire vivre et fonctionner les entreprises de presse ?
Les parties prenantes, une stratégie gagnante
La théorie des parties prenantes propose de porter l’intérêt général au-delà du calcul des dividendes des actionnaires. C’est pour contrer la vision managériale minimaliste de Shareholder (approche actionnariale) que la notion de Stakeholders (parties prenantes) a été développée. L’entreprise est envisagée comme un lieu ouvert où se croisent différents types de relations entre ses parties prenantes : ses collaborateurs, clients, fournisseurs, actionnaires, partenaires et plus largement son environnement. Elle vise, en effet, à démontrer que les dirigeants ont un rôle, des obligations et des responsabilités allant au-delà de la simple prise en compte des actionnaires, ce qui pousse l’entreprise à inclure dans sa gouvernance les droits et les intérêts des parties prenantes non actionnaires. Selon (Jones, 1995) Les entreprises qui tiennent compte de ces parties prenantes s’octroient un avantage compétitif par rapport à celles qui ne le font pas et obtiennent des performances aussi bonnes sinon meilleures que les autres. La manière dont les entreprises sont gérées détermine le lien qu’ont ces dernières avec les parties prenantes et décrit les pratiques en matière de responsabilité sociale et de citoyenneté. La nature de la firme détermine les liens entre la prise de décision et les parties prenantes. La taille de l’entreprise et le secteur d’activité en sont des points essentiels.
Le provincial est un journal qui défend à sa manière et autant que faire se peut les intérêts des citoyens. Il considère que ce dernier est partie prenante à part entière qu’il tend à valoriser et défendre de différentes manières. Privilégiant l’actualité sociale et celle à dimension sociétale plus que l’actualité politique, il considère que cette dernière relève du ressort de la presse partisane ou politique. Pour rendre visible la devise du journal, « Le journal citoyen » il opte pour une stratégie de proximité vis-à-vis du citoyen qu’il soit lecteur ou pas du quotidien. De même, en cette période de crise économique, le journal exprime concrètement son aide au mouvement associatif ‘’positif’’ loin du folklore et des flashs de circonstance.
L’entreprise citoyenne
Les notions de responsabilité sociale et de citoyenneté sont souvent considérées comme synonymes en langage commun et par de nombreux auteurs. En 2002, R. Phillips et I. Claus expliquent que pour certains auteurs, responsabilité sociale et citoyenneté d’entreprise seraient les revers d’une même médaille, mais que la première se référerait à l’aspect théorique et représenterait un ensemble de principes tandis que la seconde désignerait un ensemble de comportements qui démontrent ces responsabilités. La responsabilité sociétale ou sociale des entreprises est définie par la commission européenne comme l’intégration volontaire par les entreprises de préoccupations sociales et environnementales à leurs activités commerciales et leurs relations avec les parties prenantes. Une démarche RSE est possible pour toutes les entreprises quelle que soit leur taille, leur statut ou leur secteur d’activité. Il suffit de le vouloir. Pour les grandes entreprises et multinationales, l’impact et enjeux sociaux et environnementaux sont pris en considération. L’entreprise citoyenne pousse les dirigeants à revoir leur stratégie pour répondre aux nouvelles attentes des consommateurs et des pouvoirs publics : plus d’éthique, de transparence et de responsabilité. Le rôle de l’entreprise dans la société évolue, et l’on remarque l’apparition de nouvelles formes d’entrepreneuriat qui ne se bornent pas au simple profit. Ce concept relativement récent, a été créé pour désigner les entreprises qui se soucient de l’intérêt général que pour l’intérêt de l’entreprise. Les collaborateurs (salariés) sont une partie prenante très importante dans cette approche et qu’il faut absolument définir une stratégie de rémunération et de motivation convenable.
Plusieurs entreprise de grandes moyennes et petites tailles mènent des actions citoyennes en Algérie, nous citons à titre d’exemple l’accompagnement par l’entreprise la Sonelgaz aux associations caritatives, son rôle dans la lutte contre la pandémie de la Covid 19, mais surtout les constructions de nids pour les cigognes sur les poteaux électriques dans la région d’el tarf. Dans la sphère médiatique nationale, le groupe El Chourouk entreprend des actions citoyennes entre autre en valorisant des personnalités et les jeunes lauréats au baccalauréat et les enfants qui ayant appris le coran à titre d’exemple.
Actions citoyennes
En guise d’actions citoyennes, Le Provincial offre des espaces publicitaires gratuitement pour aider à promouvoir les actions d’intérêt public, il fait des dons dans le domaine de la santé. Don pour le centre anti cancer à Annaba en mai 2020 et un deuxième en période de Covid 19, pour ne citer que ces deux actions récentes. Le Provincial a mené de bonnes initiatives en collaboration avec l’université Badji mokhtar Annaba, où il a ouvert son espace pour les étudiants du club média et culture du département des sciences de l’information et de la communication pour publier quotidiennement leurs articles dédiés aux activités des clubs scientifiques. Une approche citoyenne pour donner de la visibilité aux actions estudiantines, et de faire un pré-recrutement. D’ailleurs deux des étudiantes qui signaient les articles dans la tribune des étudiants ont été recruté par la direction du quotidien. Et la dernière action en date est le sponsoring pour une conférence sur la critique cinématographique pour une association culturelle au profit des jeunes cinéphiles. Sur le plan interne, l’entreprise veille au respect des normes imposées par la loi du travail, notamment en ce qui concerne les salaires, améliore le milieu de travail, adopte un système de motivation, et se montre solidaire en accompagnant les collaborateurs en cas de problèmes d’ordres personnels.
L’entreprise citoyenne est l’entreprise de demain, un journal qui exerce sa citoyenneté est un média qui s’inscrit dans un paradigme de développement local avec une approche participative et une philosophie de communication centrée sur son environnement interne et externe car « informer c’est renseigner, communiquer c’est transmettre ».