Par : Zaoui Abderaouf
Ennui, morosité, cafés, jeux de cartes et de dominos, parties de football à six dans certaines agglomérations, font le quotidien des jeunes de la wilaya de Mila. « Dure est la vie » est le refrain de tous les jeunes, ils crient leur désarroi et leur ennui à qui veut les écouter mais, malgré tout, ils prennent la vie du bon côté, ils rient de bon cœur et se plient à la volonté de leur destin, la fatalité est devenue leur leitmotiv, car la plupart n’espèrent rien et ne voient rien venir. Certains jeunes qui chôment depuis plusieurs années ne croient plus en rien, ils ont tout essayé, mais en vain, leur situation n’a pas évolué, à la seule différence qu’ils commencent à prendre de l’âge et continuent de vivre aux dépens de leurs parents, frères et sœurs et amis qui ont eu la chance de trouver un emploi, même dans le cadre des dispositifs d’emploi des jeunes. La routine aidant, les jeunes de la wilaya, hiver comme été, veillent, trop souvent, jusqu’au lever du jour avant d’aller se coucher et ne se réveiller que tard le soir. Durant leurs veillées nocturnes, ils font trop souvent l’objet de fouille et de contrôle des agents des brigades de recherche et d’investigation des services de sécurité, si ces derniers venaient à les rencontrer sur leur chemin, aussi ont-ils appris à toujours se munir de leurs cartes de sursis militaires et d’identité pour éviter tout imbroglio avec les forces de l’ordre. Pour les jeunes chômeurs habitant la campagne, ceux généralement habitués à avoir en leur possession un petit canif qu’ils utilisent pour « cueillir, couper et déguster » quelques herbes comestibles, ce temps est révolu, ils ont peur, nouvelle loi oblige, de se faire embarquer pour port d’arme blanche, ils se contentent de cueillette sans plus. Regarder la télévision, à l’exception des grands matches de football, ne fait plus partie des loisirs des jeunes. Pour la plupart des jeunes chômeurs, dormir le jour et ne sortir que la nuit est leur nouvel emploi du temps. Tous les jeunes chômeurs que nous avons rencontrés et abordés sont unanimes, en réponse à la question de savoir comment ils passent leurs journées hiver comme été, pour dire qu’ils ne font que dormir. Amar, un jeune chômeur de 25 ans, titulaire d’un master en économie et habitant un petit douar dans le Nord de la wilaya s’est esclaffé lorsque nous lui avons demandé comment il passait son temps, nous avouant que le lit est son seul compagnon de fortune, tout en ajoutant qu’il se rend, une fois réveillé, au café du coin pour prendre un « café double », acheter deux ou trois cigarettes avant de rentrer chez lui. Son père lui laisse toujours, selon ses dires, un peu d’argent de poche. La même réponse revient chez tous les jeunes chômeurs avec cette particularité cependant que la plupart n’ont même pas de quoi se payer un café. Heureusement pour beaucoup qu’il y a les parents, la fratrie, les amis et les voisins pour leur remonter le moral et les encourager à croire en des jours meilleurs, sinon bon nombre d’entre eux auraient sombré dans la délinquance ou la dépression.