Par : M. Rahmani
Au vu du très grand nombre de manifestants, hier sur le Cours de la Révolution à Annaba, malgré une forte présence des services de sécurité mobilisés très tôt dans la matinée, la résurrection du Hirak, a pris de court certains analystes qui s’attendaient à un flop et qui, quelque part l’espéraient. Non, le Hirak n’est pas mort, tel un phénix, il renaît de ses cendres et rien ni personne ne peut l’arrêter.
Hier donc, c’est une véritable marée humaine qui a sillonné les artères de la ville sous les regards des policiers en faction et présents dans les fourgons, attendant les ordres pour intervenir. La foule scandait les mêmes slogans pour exprimer son refus du système qu’elle accuse de tous les maux et d’avoir mis à genoux tout un pays détournant ses richesses et pillant ses ressources. « L’istiqlal, l’istiqlal » répétaient les manifestants à l’unisson ; ils criaient leur refus et leur rejet de la 3issaba dont ils disent qu’elle est toujours dans les circuits du pouvoir, qui a ses entrées, ses soutiens intérieurs et extérieurs. « Dawla madania, machi 3askaria » Un Etat civil, pas militaire ! criaient à gorges déployées des milliers de voix. Les manifestants veulent un État civil, un État de droit, respectueux des droits de ses citoyens, loin de toute pression des militaires, un gouvernement civil avec un vrai ministre de la Défense comme dans les autres États normalement constitués.
Il y avait dans cette marche pour la liberté, des jeunes, des moins jeunes, des femmes voilées, d’autres habillées à l’occidentale et d’autres encore avec le voile traditionnel, comme pour dire que le Hirak n’exclut personne et qu’il rassemble en son sein et prend sous son aile toutes les catégories de la population. L’emblème national agité par des centaines de mains ouvrant et fermant la marche, des banderoles portant des slogans phares du Hirak devenu le seul moyen d’expression libre du citoyen algérien qui, il faut l’avouer, ne croyait plus en rien.
Ce qui a encore plus mobilisé les hirakistes est cette déception perceptible qui se dégage de ce mouvement et qui s’exprime pour tout rejeter en bloc. Une déception venue suite à ce remaniement tant attendu et qui devait, en principe, restaurer un tant soit peu la confiance et l’espoir. En effet, les décisions prises par le Président de la République à son retour n’avaient pas vraiment satisfait à la demande populaire concernant le changement du système. « On s’est contenté de remplacer certains ministres qui n’ont pas d’incidence réelle sur la gestion du pays, tout en gardant les mêmes à la tête de ministères régaliens, c’est comme si on avait changé certains musiciens pour ensuite continuer à exécuter la même partition. C’est juste de la poudre aux yeux pour essayer de manipuler les gens mais cette époque est révolue et les citoyens ne peuvent plus être trompés ou « infectés » par les discours bidon où la main de l’étranger est omniprésente, ça ne marche plus ! », nous a déclaré, hier, un jeune universitaire hirakiste de la première heure.
Un autre nous dira que le hirak n’a pas encore atteint ses objectifs, « Tant que certains barons sont toujours aux commandes du pays et décident de tout pour s’accaparer les biens du peuple, nous sortirons manifester comme il y a 2 ans et cela continuera jusqu’à ce que toute cette racaille aura quitté le pouvoir et que l’Algérie soitera libérée. », nous confie ce retraité qui a tenu à participer à la marche et qui dit qu’il continuera à marcher.
Hier, les citoyens d’Annaba ont répondu présents à l’appel du Hirak et ils étaient tout heureux de retrouver cette ambiance où ils pouvaient dire et crier à la face du monde ce qu’ils pensaient vraiment, défiant tout et envers et contre tous.
La manifestation qui a duré près de 4 heures s’est terminée sans qu’il n’y ait eu un incident, tout le monde s’est dispersé dans le calme et est reparti comme il est venu. On nous dit que cette manifestation ne sera pas la dernière et que le hirak renouera avec les marches comme avant, et ce, dès vendredi prochain.