Par : M. Rahmani/R.C.
C’est la douche froide pour les carriéristes de la députation à vie et ceux qui espèrent se représenter une 3ème ou 4ème fois consécutive ou séparée, avec les nouvelles dispositions prévues dans l’ordonnance portant loi organique relative au régime électoral et publiée ce 10 mars 2021 dans le journal officiel.
En effet, une nouvelle condition et pas des moindres est venue couper l’herbe sous les pieds de cette ménagerie politique qui a fait du Parlement sa chasse gardée et qui se représente à tout va. L’ordonnance prévoit d’écarter la candidature de tout député ayant cumulé 2 mandats successifs ou séparés, ce qui élimine de fait tous les futurs prétendants qui comptent encore s’accrocher au siège de député, empêchant ainsi militants et cadres de leurs formations de se présenter.
Le choc a été dur pour certains, car pour la plupart d’entre eux, ils ne pouvaient s’imaginer en dehors de l’hémicycle, eux qui ont goûté au pouvoir et qui sont devenus inamovibles. Lors des dernières législatives, les candidatures à la députation au niveau de la majorité des partis politiques étaient négociables et l’argent était l’atout principal et ce, en dehors de celles déjà réservées aux chefs. Un système qui n’a généré que la médiocrité et la corruption et qui a donné lieu à des comportements qui n’ont fait que perpétuer les mêmes types de candidatures, privant ainsi le pays de compétences avérées qui se sont retirées de la politique, car n’y croyant plus.
D’autres conditions sont venues verrouiller encore plus les candidatures de sorte que le futur député devra avant tout justifier de sa situation vis-à-vis de l’administration fiscale et « n’étant pas connu de manière notoire pour avoir eu les liens avec l’argent douteux et les milieux de l’affairisme et pour son influence directe ou indirecte sur le libre choix les électeurs ainsi que sur le bon déroulement des opérations électorales » ; il ne doit pas non plus avoir été condamné à une peine privative de liberté pour crime ou délits et non réhabilité.
Le nouveau mode de scrutin prévoit une représentation proportionnelle et un vote préférentiel sur une liste ouverte sans panache, ce qui élimine de facto l’achat des voix ou des places dans les listes de candidatures confectionnées par les formations politiques.
Sur ces listes il est aussi prévu le respect de la parité hommes- femmes, la condition d’âge pour les jeunes candidats dont le nombre doit être égal à la moitié de la liste présentée et pour les universitaires, ce quota doit être relevé au tiers.
Avec toutes ces conditions, les manœuvres de certains partis qui comptent participer à ces élections législatives prévues en juin prochain sont réduites, le jeu est ainsi fermé et des garde-fous ont été posés. Certaines formations sont très enthousiastes et déclarent participer à ces élections, à l’instar des formations ayant soutenu activement le système Bouteflika FLN, RND, TAJ, ANR et qui comptent se refaire une virginité en souscrivant pleinement à cette démarche du pouvoir. D’autres s’y opposent fermement, comme le Parti des Travailleurs de Louisa Hanoune qui rejette catégoriquement toute participation et qui appelle au changement du système ou encore « Talaie El Houriat » (Parti de l’avant-garde des libertés) dont le comité central est en guerre contre son président par intérim, M. Abdelkader Saadi, au sujet de la participation ou non à ces législatives. Abdelkader Bengrina du parti El Bina, Moussa Touati du FNA et Abderrazak Makri du MSP y souscrivent sans même en référer à leurs structures.
« Un Code électoral extrêmement dangereux »
L’un des motifs du rejet des législatives par le PT est le code électoral jugé « extrêmement dangereux ». « Non et non, ces élections ne renforceront pas la démocratie. » ; estime le parti de Hanoune qui pointe du doigt « un Code électoral extrêmement dangereux » et « un dispositif politique tout autant dangereux que le pouvoir a mis en place pour caporaliser les institutions élues via une société civile fabriquée », et conclut que le prochain scrutin porte en lui-même « l’étranglement du multipartisme et de l’indépendance des syndicats et des associations », donc « la destruction de la démocratie politique » pour la « mise en place d’un système totalitaire » et « la légalisation de la corruption politique et sa généralisation ».
Pour toutes ces raisons, les prochaines législatives ne contribueront pas, aux yeux du PT, au « renforcement de l’immunité de la nation ».
Dans ses réponses aux questions des journalistes, Mme Hanoune a particulièrement fustigé ce qu’elle qualifie d’« entités politiciennes » destinées à « rafler les assemblées élues » et servir de nouvelle « base pour le pouvoir ».
Il s’agit notamment du collectif de la société civile récemment constitué et qui cache, selon la SG du PT « le recyclage des anciennes figures des partis du système ».
« On va vers une mascarade, un cirque. Il y aura des dizaines de milliers de listes de candidature et c’est le Trésor public qui les financera. Nous sommes en crise, mais l’État encourage la corruption et la dilapidation de l’argent public (…) au moment où on parle de l’abandon des subventions et des transferts sociaux », dénonce-t-elle.