Par : Hamid Baali
Ces dernières années, les autochtones assistent avec tristesse à la descente aux enfers de leur célèbre place Ahcène Harcha, leur lieu convivial de rencontres lors des emplettes quotidiennes et, particulièrement durant le mois sacré du Ramadhan. En effet, selon des citoyens qui se sont rapprochés de notre journal, des générations de Guelmois ont fréquenté cet espace commercial qui était leur passage obligé. Ammi Salah, un septuagénaire retraité de l’éducation nationale, nous confie : ” Je me souviens de ces belles années lorsque j’accompagnais, dès mon jeune âge, mon père qui était un fidèle client de ce marché du centre-ville.
Devenu adulte, je continuais à m’y rendre pour me remémorer des scènes inoubliables des vendeurs accroupis devant leurs étals et proposant des bouquets de persil, de cèleri, de coriandre, des asperges, des radis, du beurre frais, du lait de vache, du petit-lait, de la laitue, des dioules et de la volaille élevée dans la campagne. Mes enfants étaient à mes côtés et prenaient un malin plaisir à contempler des coqs, des poules, des oies, des canards et des dindes qui apportaient un charme indéniable à cet endroit pittoresque qui ne désemplissait pas à longueur de journée. Nous pouvions acheter des pots de miel pur, des olives traitées à la maison, des légumes frais et des fruits de saison puisque plusieurs campagnards proposaient des figues de Barbarie qu’ils épluchaient à leurs clients et également des figues fraiches, des nèfles et du raisin de table ! “.
Ammi Ali, son voisin, nous explique qu’à cette époque, le client était roi puisqu’il était accueilli chaleureusement par les vendeurs qui n’hésitaient pas à lui réserver des produits frais de bonne qualité. Tout le monde se connaissait et se respectait et chacun prenait plaisir à deviser avec son prochain. Ce qu’il regrette amèrement, c’est la fermeture depuis plus d’une douzaine d’années du marché couvert qui abrite une quarantaine de stalles, d’étals et de boucheries. Il poursuit : ” Dans un passé récent, nous évoluions dans ce centre commercial qui grouillait de monde qui se saluait et se respectait surtout ! Il nous était loisible de discuter à bâtons rompus avec ces commerçants si attentionnés et qui nous servaient le sourire aux lèvres. Ils prenaient nos commandes la veille et nous conservaient une fressure d’agneau, une tête de mouton, un gigot, des côtelettes et autres morceaux de choix ! Hélas ! Les vendeurs ont déserté ce marché et ont préféré exercer à la sauvette pour se soustraire aux frais des charges, loyer du stand, fisc…etc. C’est la rançon du progrès ! “.
Nos interlocuteurs s’accordent à concéder que cette place Harcha et le marché couvert édifié durant l’époque coloniale sont devenus déserts et lugubres. Ce riche patrimoine si cher aux Guelmoises et aux Guelmois est livré à lui-même et d’aucuns osent espérer qu’un jour il ressuscitera de ses cendres !