Les condamnations à l’encontre des journalistes se succèdent en Algérie. La sentence est tombée hier contre Mohammed Lamine Moussaoui, journaliste au quotidien Annabi Essarih. Notre confrère a été condamné par le tribunal correctionnel d’Annaba à deux mois de prison avec sursis pour « attroupement non-armé ».
Les faits remontent au 13 novembre 2019, lorsqu’il était sur le Cours de la Révolution pour couvrir une manifestation pro-élections et pro-Gaïd Salah. Sur place, il avait été embarqué par les forces de l’ordre au niveau du commissariat central d’Annaba, où un procès-verbal a été établi à son encontre. Le procureur avait requis une peine d’un an de prison ferme et une amende de 50.000 dinars. Lors du procès, le journaliste et son avocat ont tenté d’expliquer au juge que M. Moussaoui ne faisait que son travail comme l’y autorise les lois de la République. « Les forces de l’ordre et les institutions de l’Etat sont même dans l’obligation de protéger mon client et de faciliter ses missions, compte tenu des lois de la République et de la constitution », a affirmé Me Abdelhalim Kheireddine devant le tribunal.
En outre, le journaliste a été le seul à être poursuivi pour attroupement non-armé. « Comme si je pouvais me rassembler tout seul », ironise notre confrère, qui affirme que la manifestation pro-élection et pro-Gaïd Salah qu’il couvrait était autorisé (officieusement), vu qu’un important dispositif sécuritaire assurait la protection de cette marche à laquelle ont pris part près de 80 personnes.
De nombreux internautes ont exprimé leur solidarité au journaliste condamné hier, affirmant au passage que c’est honteux de condamner un Algérien, journaliste ou pas, pour « attroupement non-armé », autrement dit « manifestation pacifique », un droit censé être garanti par la loi fondamental du pays.
Depuis le début du Hirak, une dizaine de journalistes et de blogueurs ont été emprisonnés, alors que de nombreux autres sont sous les coups de poursuites judiciaires. Les arrestations des journalistes qui continuent à faire leur travail sans prendre en considération les pressions et les injonctions, ceux qui refusent de s’adonner à l’autocensure sont, aujourd’hui, victimes d’acharnement judiciaire et d’harcèlement sécuritaire destinés à les empêcher de rapporter l’information. A Annaba, M. Moussaoui est le deuxième journaliste à être condamné cette année. Notre rédacteur en chef, M. Mustapha Bendjama a été reconnu coupable à deux reprises par le tribunal correctionnel d’Annaba pour des « publications pouvant nuire à l’intérêt national ». Il a ainsi été condamné deux fois à 2 mois de prison avec sursis et 20.000 dinars d’amende. Le 22 février 2021 (deuxième anniversaire du Hirak), le juge du même tribunal prononcera le verdict, dans une troisième affaire contre M. Bendjama.
M. A.