Par : Chergui Sarra
Au cours des trente dernières années, la dépression post-partum et la dépression maternelle apparaissant durant les premières années de vie de l’enfant ont fait l’objet de nombreuses recherches en psychologie et en psychiatrie.
Mais d’abord, c’est quoi la dépression post-partum ?
La dépression post-partum ou la DPP touche de 10 à 15% des mères et correspond à des symptômes dépressifs prolongés qui durent plus de deux semaines et qui se manifestent à tout moment pendant l’année suivant l’accouchement. Les symptômes de la dépression du post-partum peuvent être semblables à ceux de la dépression majeure et peuvent comprendre : des plaintes somatiques persistantes comme des céphalées ou des douleurs abdominales. Fréquemment, on observe des phobies d’impulsion, qui consistent en un état obsessionnel qui prend le dessus sur la conscience du sujet, entraînant une peur maladive de perte de contrôle sur ses actes et de commettre des gestes absurdes, déplacés et même dangereux pour soi-même ou pour les autres, englobant « la crainte de faire du mal à son bébé », des sauts d’humeur graves et des idées suicidaires.
Il est important de différencier la DPP du syndrome du 3ème jour, communément appelé « BABY-BLUES », retrouvé chez 30 à 80% des femmes et qui survient généralement entre le 3ème et le 6ème jour après l’accouchement sans dépasser deux semaines. Il est marqué par des symptômes moins graves : Sauts d’humeur rapides, irritabilité, anxiété, diminution de la concentration, insomnie et crises de larmes. Dans ce cas, un traitement médicamenteux n’est pas nécessaire. Le soutien des proches et du personnel soignant suffit habituellement à le faire disparaître en 4 à 7 jours au maximum.
D’où provient cette dépression ?
Des causes psychologiques peuvent être incriminées tels que les énormes changements de vie provoqués par l’arrivée du bébé et les attentes derrières , la culpabilité d’être incapable de prendre soin de l’enfant ou de ne pas être une bonne mère, être dépassée par les contraintes et les difficultés rencontrées (d’un simple changement des couches vers une réaction devant une situation d’urgence).
À cela s’ajoutent les causes hormonales, principalement la chute rapide de la progestérone, directement incriminée dans la survenue de symptômes dépressifs.
Par ailleurs, les femmes qui ont déjà souffert de dépression ou d’anxiété dans le passé / pendant leur grossesse présentent un risque plus important de développer une dépression post-partum. L’absence de soutien par les proches, des relations difficiles et des habitudes toxiques comptent aussi comme des facteurs de risque.
Quelle-sont les conséquences de la DPP ?
La dépression du post-partum perturbe la capacité des femmes à s’occuper d’elles-mêmes et de leur nourrisson avec qui elles ne peuvent pas former de liens, ce qui entraîne des problèmes émotionnels, sociaux et cognitifs plus tard chez l’enfant. Les partenaires peuvent également être à risque accru de dépression sans oublier le stress relationnel qui peut en courir.
Sans traitement, la dépression du post-partum peut disparaître spontanément ou devenir chronique et la complication la plus grave est le suicide.
La dépression post-partum du papa, est-ce possible ?
Au cours des trois premiers mois suivant l’accouchement, la dépression post-partum est présente chez environ 8 % des pères et ce taux augmente dans les trois à six mois après la naissance de l’enfant. Ils ont tendance à exprimer leur angoisse davantage avec de la colère, de l’impatience, de l’irritation, des symptômes anxieux ou encore de l’abus de substances (ex : alcool, drogues) que par de la tristesse et des pleurs. Les pères risquent plus de développer des symptômes dépressifs si leur conjointe souffre de dépression. Ils risquent aussi plus de faire une dépression post-natale s’ils ont déjà fait une dépression ou si la grossesse n’était pas programmée. Il existe d’autres facteurs incriminés, tel qu’un faible niveau socioéconomique ou encore une relation conjugale insatisfaisante. Dans tous les cas, une prise en charge médicale est indispensable.
Que faire devant une DPP ?
Il est important de repérer un tel trouble de l’humeur et de proposer un traitement approprié car la dépression maternelle peut entraîner des relations mère-enfant pathologiques pouvant altérer le développement du bébé. La maman doit être prise en charge afin que l’épisode ne se prolonge pas et que les interactions précoces s’effectuent dans les meilleures conditions.
Une psychothérapie pourrait être envisagée pour certains parents, alors que d’autres auront peut-être aussi besoin d’antidépresseurs pendant un certain temps, sans négliger une alimentation saine et équilibrée et un repos. Cela aidera le parent souffrant de dépression post-partum à retrouver le sourire et à profiter pleinement de son bébé.
En conclusion, les parents doivent accepter de ne pas être aussi calme et tranquille que d’habitude. Si ces émotions perdurent, ce n’est pas parce qu’ils sont des mauvais parents, c’est simplement parce que leur cerveau est en phase d’adaptation à une nouvelle étape de leur vie.
Membre du Club Averroès Faculté de médecine d’Annaba*