La fermeture de certains commerces, suite aux mesures de confinement induites par la pandémie de Covid-19, était nécessaire dans bien de cas, mais aberrante, voire abusive pour d’autres activités. C’est ce que dénoncent des patrons de restaurants, en général et ceux qui servent de l’alcool, en particulier. ‘’Le préjudice est immense’’ martèlent-ils, non sans préciser que leur mise à l’index par une administration ‘’religieuse’’ en a fait aux yeux d’une partie de la société, des parias. Ils argumentent par le fait que leur mise à l’écart des autorisations de vente à emporter ne dépendait en réalité que de ‘’l’intime conviction’’ (sic) de décideurs locaux et non d’une réglementation claire à appliquer pour tous. Pourquoi un cafetier serait-il, en effet, autorisé à servir une chaîne de clients et pas un dépositaire d’alcool ?
En effet, ces commerçants-contribuables sont gérés, hors pandémie, comme toutes les autres activités avec en sus, l’œil doublement aiguisé des services de police générale et des impôts. ‘’En vertu de quoi une supérette, un fast-food, un bus bondé…seraient-ils moins contaminants qu’un comptoir de vente d’alcool à emporter’’, ne cessent-ils de répéter. De plus, ajoutent-ils, nous avons autant de charges financières et de personnels à entretenir : ‘’ces travailleurs ne sont-ils pas des Algériens comme les autres ?’’
L’opportunité et le système D
Aussi et, contrairement à ce que pourraient penser des esprits ‘’pieux’’, des dizaines de milliers de familles subsistent de cette activité autorisée par la législation algérienne qui en perçoit taxes et impôts dans des proportions très importantes. Par ailleurs, commercialement, la demande existe et dépasserait dans certaines régions du pays l’offre. C’est du reste ce qui a encouragé certains téméraires à profiter de la pandémie pour se lancer dans le commerce informel de l’alcool avec, cerise sur le gâteau, la création d’emplois indirects à travers la livraison à domicile. A Annaba, Alger, Constantine, Guelma… ces ‘’services’’ existent et sont parfois effectués à titre gracieux, comme pour rappeler leur soutien aux clients abandonnés à cause d’une humeur administrative. Ainsi, plusieurs adresses de points de ventes, pages facebook…sont apparues pour répondre à une immense demande en cette période de prohibition masquée d’un foulard sanitaire. A Annaba, comme dans toutes les zones d’ombre, on a les start-up qu’on peut, ironise Didina, un habitué des affres de l’administration.
Cependant, des ‘’âmes charitables’’ se sont empressées de jouer aux preux chevaliers et d’opter pour la ‘’délation citoyenne’’ (re-sic), et s’en sont allés crier à l’atteinte de la ‘’horma’’ du quartier… faisant porter dans la foulée à ces ‘’désœuvrés’’ la responsabilité de la pandémie. ‘’C’est la colère divine qui s’abat sur nous à cause de vous’’, se laissera entendre Abdou, 25 ans, revendeur occasionnel d’alcool.
Mais que fait la Police !
L’adaptation sociale des Algériens en période de crises demeure révélatrice d’un génie (maléfique soit-il, aux yeux de certains) qui fait défaut à l’administration pour ne pas dire aux pouvoirs publics, jusqu’à en révéler les limites, d’une part et une supposée concussion, d’autre part.
En effet, pas une journée ne passe, depuis plus de six mois, où les médias ne rendent compte quotidiennement de saisies importantes d’alcool, intra-muros aussi bien dans les grandes villes que dans les petits patelins et autres ‘’zones d’ombre’’. Des centaines de jeunes sont déférés à travers toutes les juridictions du pays, des incarcérations sont prononcées, des saisies records dont on ne connaitra pas le devenir, des véhicules saisis…et de téméraires chômeurs, ruinés. Aussi bien pour les services de sécurité que pour les tribunaux, la charge de travail se fait ressentir en efforts, temps et coûts. Rien à dire ; les services de sécurité sont dans leur rôle comme le précisent toujours leurs communiqués de presse qui sont rédigés de façon à mettre de l’eau dans le vin de n’importe quel quidam qui trouverait à redire ou s’opposerait à la saisie d’une marchandage non facturée et l’arrestation de son détenteur non inscrit au registre de commerce. Sauf qu’il y a un ‘’mais’’ et un grand !
Si les dépositaires, les restaurants et bars sont officiellement fermés depuis près d’un an, pourquoi les brasseries ne le seraient-elles pas ? Sinon, à qui serait destinée leur production ?
Comment des semi-remorques de bières ou de vins peuvent-ils traverser le pays de long en large, sans se faire arrêter, livrer leurs contenus, se faire payer et rentrer au bercail la fleur au fusil ?
Deux petites questions qui valent leur pesant de milliards perdus par le trésor public mais qui ne révèleront jamais au profit de qui car, c’est une évidence, dans toute transaction commerciale il ne peut y avoir deux perdants.
En l’occurrence, on ne connait pas le gagnant, même si on ne doute pas un seul instant, qu’il sera parmi les premiers à remercier l’Etat et à travers lui, le Trésor public, de lui avoir permis de bénéficier des indemnités afférentes aux retombées de la crise sanitaire.
‘’Circulez, y a rien à boire…pour les uns et beaucoup à manger pour d’autres !’’, commentent des langues pendues longtemps assimilées à tort à …des gourdes.
M.C